Face au vide de l’épuisement professionnel et à une situation complexe de chef d’entreprise, qui n’arrive plus avec ses dix doigts à colmater tous les trous du pommeau de la douche, qui ne sait plus, qui ne dort plus, qui ne vit plus, j’ai décidé de partir marcher.
Partir ?
Mais mon bon monsieur un chef d’entreprise n’a pas le droit de faillir !
Avez-vous pensé aux conséquences ?
Je ne crois pas que dans cette situation je fus en capacité de réfléchir.
J’étais happé par un quelque chose qui me faisait vomir tous les matins en entrant dans ma propre entreprise. Mon cœur tapait au-delà du raisonnable, ma tension artérielle me donnait le souffle de l’effort du sportif que j’avais été … je ne mangeais presque plus, mon regard était vide, mon cerveau tournait dans un vide abyssal et ne combattait plus avec moi …
Alors je suis parti en prenant la décision, avec famille, médecin, amis et associé … de tout laisser derrière moi, de me SAUVER, dans tous les sens littéraire du mot.
Oui, de me sauver, de moi, des autres, et partir ailleurs.
Partir marcher. Sans me retourner.
Ce fut MA solution.
Il est possible d’assimiler cela à une fuite et pourtant ce n’en fut pas une.
À aucun moment je ne me suis senti en fuite, mon but étant de revenir plus fort, plus grand, reconstruit, réparé, droit.
Et en accord profond avec mes actes et mes pensées.
On ne fuit pas lorsqu’on part à la recherche de soi.
« Parti marcher » deux mots écrit sur un post-it collé sur la porte de mon appartement.
Fuite… Fuir… Se sauver… je crois, en ce qui me concerne, que le courage réside dans cela.
Courage de partir. Courage de se regarder. Courage de s’affronter.
Courage aussi de savoir que la valise sera là.
Au retour.
Fuir n’est pas un vain mot lorsque la compréhension du retour est présente.
Alors ma fuite, si tel est le cas, est organisé pour mon bien être suivant.
Oser partir fut un acte rédempteur, une renaissance par les pas.
172 jours de marche, 4500 km, 5 500 000 pas.
4 pays traversés.
Des bivouacs, des belles étoiles, des accueils magnifiques, des rencontres, des mots, des lignes, un carnet de notes noirci, un début d’autre chose.
Accueillir ce temps non pas comme une fuite mais comme un moyen pour comprendre :
Je n’ai rien occulté.
Pas même les visages décomposés de ceux qui me voyaient dévisser dans un trou sans fond.
Leurs mains tendues ne tenaient qu’un espoir. Celui de me voir remonter.
J’ai saisi cet espoir en lâchant leurs mains.
Je l’ai compris après un repas chez des amis où chacun y allait de son conseil. Comment je devais faire, comment je devais être, comment je devais composer !
Au retour chez moi, à nouveau seul dans la nuit à ruminer mes peurs, mes faiblesses et mes attentes d’un autre jour, j’ai su que je devais partir.
Peut-on imaginer que j’ai fuis pour mieux comprendre la solitude face à moi, face à l’épuisement?
En partant je me suis retrouvé.
Et avec courage je suis revenu.
Alors fuite ou courage ?
A chacun de trouver le mot juste.
Pour moi, aujourd’hui, et après cette expérience vécue,
c’est juste d’avoir osé.
2 Commentaires. En écrire un nouveau
Bonjour Philippe !
Courage ou fuite ? Je crois effectivement que la question ne se pose plus quand on ne s’appartient plus. Partir n’est pas un choix mais une question de survie, comme tu le dis si bien.
La question du courage se pose peut-être autrement ou différement, dans une étape que tu nous feras peut-être découvrir prochainement… Le courage de revenir
Bonjour Vincent,
D’une certain façon la question va souvent restée posée. Partir, se sauver, fuir, …
Et de s’affronter dans le questionnement et de la justesse de la décision.
A suivre pour la suite …
Bien à toi
Philippe